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Histoire - Lucien Mias a révolutionné le jeu d’avants

Par J. P.
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    Lucien Mias, légende du XV de France ici sous les couleurs de Mazamet, a révolutionné à sa manière le rugby Icon Sport et archives Midi Olympique
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Lucien Mias était un leader charismatique mais aussi un technicien de premier plan. Ses idées sur le jeu des avants ont marqué un tournant.

On le surnommait Docteur Pack pour deux raisons. Premièrement, de par sa profession, puisqu’il était médecin, ce qui n’était pas courant dans les rangs du XV de France. Mais on l’appelait aussi Docteur Pack pour sa culture et pour sa science, science du jeu d’avants. L’apport de Lucien Mias fut d’abord technique. Il a révolutionné le jeu d’avants considérant que les membres du pack devaient sortir de leur cantonnement au combat statique. Deux idées novatrices sont associées à sa mémoire : le demi-tour contact et la touche longue.

Il avait été très influence par le jeu des Sud-Africains, costauds, féroces c’est entendu, mais organisés collectivement. En 1952, Lucien Mias avait fait partie d’un XV de France qui avait été "balayé" par les Springboks à Colombes, 25 à 3 et six essais à zéro. Il avait été très marqué par cette expérience douloureuse. : "Ils nous avaient balayés par des avants qui jouaient groupés. J’ai dit à l’entraîneur de Mazamet d’en faire autant. Il fallait arriver par vagues. J’ai transposé ça à l’équipe de France." Oui, Lucien Mias pensait que les avants devaient jouer collectivement, liés comme des morceaux de bois dans un fagot et contrairement à ce qu’on aurait pu croire, ça n’allait pas du tout de soi en France dans les années 50.

Lucien introduisit l’idée novatrice que les avants devaient aussi impulser des mouvements par eux-mêmes, après les touches longues par exemple, soutenues par des relais soignés en fond d’alignement, stratégie dont les Néo-Zélandais allaient peaufiner l’idée dans les années 60. Avec le recul, on se demande bien comment Lucien avait pu se livrer à de savantes analyses à une époque où les images étaient rares. Et pourtant, il sut maîtriser l’expérience comme un Lavoisier 150 ans avant lui : "Après avoir analysé la façon de jouer des avants springboks organisée et organisante, opposé à la nôtre, gauloise et éparpillée, j’avais expérimenté à Mazamet la touche en mouvement et le demi-tour contact qui furent le fondement de jeu d’avants après le match de Bordeaux de 1957 où la qualité de jeu et la victoire étonnèrent."

France-Roumanie 1957 : moment clé

La patte Mias s’articula autour d’une rencontre clé, le France-Roumanie du 16 décembre 1957 au Parc Lescure de Bordeaux qui marquait le grand retour de Lucien chez les Bleus après trois ans d’absence. La France s’était imposée 39-0 avec huit essais dont deux d’André Boniface, quelque part son exact contraire : "Les trois-quarts français avaient le jeu déblayé par les avants", put-on lire dans les gazettes, phrase fondamentale. .Il n’était même pas capitaine ce jour-là, c’est Michel Celaya qui occupait cette fonction. Mais il avait déboulé dans le groupe avec une assurance stupéfiante en énonçant ses principes et en distribuant les rôles à chacun. La période dorée commença en cet après-midi gris et froid. "Mais il faut savoir qu’à l’époque, tout le monde était contre le demi-tour contact, au nom du beau jeu, des attaques magnifiques des trois-quarts. Même mon rédacteur en chef était contre. Mais il me laissait le soutenir, il n’était pas fou ", reprend Henri Gatineau. "À l’Equipe, c’était un peu pareil, on adorait le jeu à la montoise. Mais Denis Lalanne qui avait des relations privilégiées avec Lucien, contrebalançait aussi même s’il adorait les Boni."

Lucien Mias n’était pas un apôtre du "beau rugby" comme on aime à le célébrer par facilité. Pour lui, il s’agissait d’abord d’avancer, il avait l’œil rivé sur la ligne d’avantage qu’il fallait franchir coûte que coûte le plus vite possible : par les avants si possible ou par le jeu au pied. Pour lui les trois-quarts n’en seraient que plus choyés quand le ballon leur arriverait… Dans de bonnes conditions. "Le combat des hommes est premier, la circulation du ballon lui est subordonnée…" déclara-t-il un jour. Il détestait l’idée de voir les attaquants tenter l’impossible sous la pression adverse avec des ballons jetés à la diable. Un sélectionneur lui avait demandé ça un jour, gagner un ballon en touche et le donner tout de suite le plus au large possible sans s’occuper de rien. Lucien avait été consterné. Pour lui un pack, c’était la proximité et la promiscuité : la preuve on y attrape tous les virus, parole de médecin.

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