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Top 14 - Entre rudesse et chambrage, portrait de Vermeulen, un "King" plein d'espoirs à Clermont

  • Elvis Vermeulen est aujourd'hui à la tête des Espoirs de Clermont.
    Elvis Vermeulen est aujourd'hui à la tête des Espoirs de Clermont. ASM Rugby
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Elvis Vermeulen est à la tête des Espoirs de l’ASM depuis 2022, après un passage formateur en amateur. Avec le logo jaune et bleu marqué au fer rouge, l’ancien numéro 8 de Clermont veut continuer de gravir les montagnes, entre rudesse et chambrage.

"Ils sont jolis ces mollets de brindilles !" Juste avant de rencontrer Elvis Vermeulen, l’ancien numéro 8 clermontois n’a pas changé. L’éternel chambreur a cette fois fait d’un entraîneur des jeunes du Clermont foot sa victime de la journée, au complexe des Gravanches, en périphérie de Clermont-Ferrand. Rugbymen et footeux se croisent toute la journée, entre musculation, plaquages rugueux et frappes en lucarne.

Entre les murs blanc de cet original espace partagé, l’entraîneur Vermeulen prépare les séances d’entraînement de ses Espoirs, prévus chaque fin d’après-midi. Un rythme calqué sur celui des professionnels de l’ASM avec un objectif : faire monter le plus de jeunes à l’étage supérieur. Avec plus de trois cents matchs disputés sous le maillot jaune et bleu entre 2006 et 2014, un bouclier de Brennus (2010), et dix sélections avec le XV de France (2001-2008), Elvis Vermeulen a décidé d’embrasser la carrière d’entraîneur dès la fin de sa carrière, en 2014.

Au lieu de se diriger vers les skills, à l’instar de Benson Stanley ou Morgan Parra plus tard, "le King" a redescendu l’échelle jusqu’au sol, avec le rugby amateur. "J’ai fait toutes mes formations avec l’école de rugby du CUC Aubière (NDLR : club de Fédérale 3), en gérant l’ensemble des classes d’âge du club. Avec les enfants, c’est comme avec un tableau noir : il y a juste à écrire et ils comprennent tout de suite. C’est magique ! Ensuite, chez les Seniors, on a réussi à faire deux montées en trois saisons avec un concept que je me suis auto approprié : “être sérieux sans se prendre au sérieux” et ça a marché. Grâce à cette expérience, en 2022, l’ASM est venue me voir pour entraîner les Espoirs, mon cœur me disait oui et ma tête me disait de réfléchir".

"Les trois-quarts ne servent à rien !"

Un chemin de reconversion qui prend ses sources bien avant la fin de la dernière décennie. Élevé presque intégralement à la mamelle de Vern Cotter, Elvis Vermeulen a appris à entraîner lors de ses dernières années en jaune et bleu, sous les directives du sorcier néo-zélandais. À cette époque, les grognards de l’ASM devaient systématiquement diriger des séances pour les jeunes de l’école de rugby clermontoise. "J’adorais cela et je me posais la question de devenir entraîneur. Vu que je n’aime pas faire comme tout le monde en intégrant un staff professionnel, j’ai voulu commencer avec les petits pour agrandir mon expérience et faciliter mon intégration vers le monde professionnel, d’où ma première expérience en Fédérale 3, avec Aubière. Et lorsque Clermont est revenu vers moi, j’ai hésité parce qu’en cas de départ, j’allais laisser le CUC Aubière et tout ce que j’avais créé, c’était un petit peu mon bébé. Je voulais donc partir en m’assurant que le club serait entre de bonnes mains, et cela a été le cas ! Aujourd’hui j’ai accompli une partie de mon rêve en étant à la tête des Espoirs et j’en suis très fier".

L’ancien numéro 8 était autant redouté par sa puissance physique et ses dégâts ballon en main qu’attendu sur le pas de tir de l’humour. Mais qu’en est-il de l’entraîneur Vermeulen ? Jean-Maxence Jules Rosette, talonneur des Espoirs de Clermont (7 apparitions en professionnel) caractérise son entraîneur avec un triptyque symbolique du personnage. "Il est respectueux, humble et drôle. Il respectera les joueurs dans n’importe quelle situation et cherchera toujours à communiquer et à dire les choses, qu’elles nous plaisent ou non. Mais on peut aussi faire les cons de temps en temps (rires). Je dirais que son approche est davantage tournée vers le combat".

L'ancien numéro huit de l'ASM est respecté par tous ses joueurs.
L'ancien numéro huit de l'ASM est respecté par tous ses joueurs. ASM Rugby

Questionné sur sa philosophie de jeu, Elvis Vermeulen reste muet quelques secondes, les yeux tournés vers le plafond, avant de se marrer. "Les trois-quarts ne servent à rien (rires) ! Plus sérieusement, j’essaie surtout de leur faire transpirer le leitmotiv que j’avais étant joueur. Je n’étais pas le plus grand des joueurs, par contre j’essayais de faire mon maximum pour faire briller les autres. J’essaie de leur inculquer ce genre de valeurs ! Je suis dur mais juste, mais je suis toujours aussi chambreur. J’aime bien mettre des pièces aux joueurs tout en étant directif et participatif avec un objectif : que mes gamins se battent pour le club, pour l’entraîneur en partie, et surtout pour eux. Je ne m’autorise jamais à mentir. Si un joueur est nul, il doit l’entendre et comprendre pourquoi et inversement".

D’autant que le "King" n’est pas n’importe qui en Auvergne. Fort d’un CV étoilé en jaune et bleu, Vermeulen est un nom qui pèse et résonne à sa juste mesure chez les jeunes clermontois. "Son passé de joueur est incroyable, on l’écoute tous et tout le monde sait qu’il n’est pas arrivé là par hasard" poursuit Jean-Maxence Jules Rosette.

L’influence Cotter, l’inspiration Novès

Mais en creusant un peu plus derrière les blagues estampillées Elvis, le champion de France 2010 semble vouloir marcher dans les pas de son ancien boss. "Je me suis approprié une partie de ce que m’a transmis Vern Cotter. J’essaie d’être aussi dur et juste qu’il l’était. Un bon entraîneur est un entraîneur authentique".

Derrière la logique Cotter, un autre manager a viscéralement marqué Vermeulen… après seulement un match ensemble. Le 22 mars 2009, les Barbarians français de Guy Novès défient le XV des Présidents de Vern Cotter. Sous les ordres du gourou toulousain, Vermeulen a bu les paroles de son entraîneur d’un jour. "Son management était monstrueux parce qu’il savait dire les mots justes à l’instant où il fallait juste. Et techniquement il était incroyable ! Il est une source d’inspiration exceptionnelle aujourd’hui, notamment sur le plan humain. Les générations actuelles ne sont pas celles d’hier, le management doit s’adapter. C’est impossible de faire le bourrin et de dire “c’est comme ça et pas autrement” sinon ça ne marchera jamais. Un gamin braqué recule, il faut le faire avancer".

Un changement de génération visible sur tous les plans, quasiment, et une adaptation à une classe d’âge, les Espoirs, presque inconnue du principal intéressé. "Il n’y avait pas cette catégorie à mon époque ! J’étais en équipe réserve donc je jouais avec des coéquipiers qui avaient trente ans et qui voulaient leur place en professionnel autant que les jeunes. Les “vieux” étaient là aussi pour nous aider et ils nous tiraient vers le haut avec une cohésion exceptionnelle, notamment en déplacement. Aujourd’hui, un Espoir qui arrive à Clermont a un rêve : jouer en professionnel avec l’ASM. Et si au bout de trois ans les étapes ne sont pas validées, le joueur doit partir. Le côté compétitif influe bien plus qu’à mon époque".

L’expérimentation du banc en 4-4

À la tête des jeunes promesses clermontoises, Elvis Vermeulen doit concilier le double objectif de faire monter ses jeunes avec les professionnels et de bien figurer en championnat. Mais pour l’ex-troisième ligne, la mère des batailles est de faire décoller un maximum d’Espoirs en Top 14, comme ce fut le cas avec Léon Darricarrère, Yérim Fall, Robin Couly ou Théo Giral cette saison. "Le staff professionnel nous demande des attendus, des joueurs “livrables” et on essaye de répondre aux besoins de Christophe Urios. On se bat pour que les gamins montent au maximum avec l’équipe première. Même si on en est privé le week-end, on préfère cent fois qu’il joue avec les professionnels. Un joueur qui ne joue pas ne progresse pas. On envoie plein de données et de clips vidéos à Christophe Urios pour qu’ils aient une chance, ensuite c’est lui qui décide bien sûr".

Le "King" n'a pas perdu son côté chambreur.
Le "King" n'a pas perdu son côté chambreur. ASM Rugby

Mais avant de lancer une partie de sa classe biberon dans le grand bain, Elvis Vermeulen analyse, tranche et innove. La saison dernière, lors d’une rencontre face au Stade français, le "King" et son staff se sont lancés un défi : aligner un banc de remplaçants avec quatre avants et quatre trois-quarts. Une hérésie pour les puristes du ballon ovale qui n’est pas sans rappeler le fameux "7-1" de l’Afrique du Sud en Coupe du monde.

Un an plus tard, Elvis Vermeulen est revenu sur cette stratégie sortie de nulle part. "On avait un talonneur avec un profil de deuxième ligne pour rendre cela possible, il pouvait être utilisé sur les deux postes. Et même si je ne supporte pas les trois-quarts il faut bien qu’ils servent à marquer des essais (rires) ! À la fin de la rencontre, les entraîneurs du Stade français sont venus nous voir un peu bouche bée en nous disant “on ne savait pas que c’était possible”. Aujourd’hui, je vous mets au défi de me dire quel entraîneur serait assez fou pour faire pareil !" sourit l’ancien numéro 8 des Jaunards, aujourd’hui rivé sur un objectif : être entraîneur d’une équipe professionnelle.

"J’ai fait une demande de diplôme pour passer à l’étage supérieur qui a été validée par l’ASM. C’est un métier difficile, mais dans lequel ça vaut le coup de se brûler les ailes… même s’il vaut mieux avoir des ailes en acier (rires)". Comme ses jeunes, Elvis Vermeulen espère maintenant gravir un nouvel échelon et retrouver la fureur du monde professionnel, mais sans perdre l’art du chambrage.

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